Pérégrination au cieux

La pérégrination au cieux où lorsqu’un voyage de la conscience arrive au seuil d’une autre dimension. Voici un passage du livre « les récits hassidiques de Martin Buber« .

« le jour, il sert les créatures. Dès le matin, transportés par le vent, les messagers arrivent chargés du poids de toute les revendications de la terre, des plaintes et des souffrances de tous les êtres vivants. Il reçoit leurs appels, distribue la consolation. Le contact de ses doigts guérit les blessures du monde.

Le jour, il sert les créatures; mais le soir, son âme s’élève loin de son corps endormi; il dépasse la durée et le lieu comme des menottes et, d’un coup de pied repoussant la terre, vole libéré jusqu’au cieux qui l’accueillent.

Là il n’y a plus ni espace ni temps mais seulement un chemin d’éternité.

Or, une nuit, un mur masque le chemin de l’insondable. Un doigt éteignit la lumière des étoiles et les promesses de tous les cieux. Une entrave gigantesque aux proportions de l’élan sans borne du vol, s’oppose à l’essor de l’âme. Sur le chemin disparu, un mur sinistre s’éleva dans la nuit.

Ce mur avait un visage prodigieux et obscur. L’âme le connaissait: c’était l’image de la vie telle qu’elle venait de la quitter, telle qu’elle la retrouverait le lendemain matin comme un  lit toujours prêt.

Mais au-delà du mur un son monta, une grande Voix résonna dans l’obscurité qui disait: « Âme, âme exigeante qui veut se conserver et se perdre, qui désire en même temps l’existence et l’infini, le monde des sens et celui du mystère, c’est ici la limite; c’est ici l’autel du monde.

pérégrination au cieux


Ici l’âme ne passe pas si elle ne sacrifie pas quelque chose, car le nom de ce lieu est: le choix de Dieu. Jusqu’ici, il y avait de l’un et l’autre. Ici, l’Unique commence.

Âme qui est arrivé là, choisis. Détache-toi de la terre et je m’ouvre à toi, ou bien reprends ton vol et retourne d’où tu viens. Celui qui m’a touché ne retourne plus ».

La voix se tut.

L’âme resta suspendue comme suivant la trace de la Voix qui s’éloignait et elle commençait de dire: « Je me sépare », quand un appel monta de la terre.

Une femme s’était penchée sur le lit dans lequel reposait un corps d’homme; elle avait regardé le visage pâle, senti en tâtonnant la tempe froide et poussé ce cri: « Israël ».

Son appel fendit les cieux, rejoignit directement sur le chemin l’âme qui avait pris tant de nuits à le parcourir et posa sa main légère sur son épaule.

Alors l’âme s’interrompit; elle entoura de son bras le cou du messager et retourna sur la terre.

Ce fut la dernière pérégrination aux cieux du Maître. »

 

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